Nouvelle stratégie française en Afrique : A la recherche d’une influence « perdue » ?

Des spécialistes analysant la nouvelle stratégie du Président français, Emmanuel Macron, pour l’Afrique, ont des avis divergents. Ibrahima Kane, spécialiste des questions africaines, pense que le problème actuel de la France en Afrique est plus profond que cela et que malgré les effets d’annonce, « il n’y a pas véritablement de changement ». Quant au Professeur Moussa Diaw, spécialiste des relations internationales, il reconnait qu’avec cette nouvelle démarche, la France cherche sa voie dans une Afrique nouvelle.  

 

Le Président français, Emmanuel Macron, a démarré, hier mercredi, une nouvelle tournée africaine qui doit le mener au Gabon, en République démocratique du Congo (Rdc), au Congo et en Angola. Auparavant, le lundi dernier, lors d’une déclaration face à la presse à l’Élysée, il avait annoncé une nouvelle stratégie française en Afrique pour un « nouveau partenariat », plus « d’humilité » et la baisse des effectifs militaires sur le continent. Interpellé sur le discours du Président français, le spécialiste des questions africaines à l’Open Society initiative for West Africa (Osiwa), Ibrahima Kane, contacté depuis Nairobi, estime que le problème de la France en Afrique est plus profond que cela et ne pense pas que les annonces de Macron pourraient inverser la tendance. « Je crois que c’est une mauvaise réponse à un problème très sérieux. Le problème des relations entre la France et l’Afrique n’est pas seulement lié à la présence militaire française en Afrique. C’est plus profond que cela », martèle M. Kane. Pour lui, la principale difficulté de la France est due à une perception africaine. « Il y a toujours la manière dont la France perçoit ses anciennes colonies. Quel type de rapport elle veut établir avec ses anciennes colonies ? ». D’après le juriste, cela dépasse le cadre militaire et touche les relations avec les pouvoirs politiques et les sociétés civiles africaines. Selon lui, le fait que pour un Africain de vouloir aller étudier en Europe, y séjourner pour voir un parent, vouloir même traverser un pays européen, soit un problème qui pèse profondément sur la manière dont la France est jugée par les jeunes du continent. Il précise : « Ces jeunes qui vont étudier aussi ailleurs qu’en France reviennent avec un nouveau type de sentiment qui n’est pas celui de nos grands-pères qui, du fait de la colonisation, avaient gardé des relations sentimentales avec la France ».

Quant à Moussa Diaw, enseignant-chercheur en sciences politiques et spécialiste des relations internationales à l’Université Gaston Berger de Saint Louis (Ugb), il voit en cette démarche une volonté de la France d’avoir une autre voie qui puisse s’adapter aux réalités africaines, après les échecs au Mali et au Burkina Faso. Cependant, le Professeur Diaw se demande si ce que propose Macron pourrait avoir un écho favorable chez les Africains. « Dans tous les cas, il propose un nouveau paradigme en parlant d’humilité, ce qui est nouveau. Il ne veut plus choquer les dirigeants et les acteurs africains parce qu’il y a eu beaucoup de contestations des méthodes de la France », insiste le Pr Diaw. Ce dernier renchérit que le Président français est toujours en train de rechercher « la bonne voie », après sa rencontre avec une partie de la jeunesse africaine, lors d’un sommet Afrique-France (le 8 octobre 2021 à Montpellier) qui n’a pas donné de résultats probants. L’analyste estime aussi que cette communication du Président français était aussi une manière d’anticiper sur les attentes avant son voyage en Afrique centrale. Toutefois, il estime que rien ne garantit que le sentiment anti-français va diminuer.

Sur le point central des relations entre la France et l’Afrique, Ibrahima Kane constate que globalement rien n’a changé. Pour preuve, il rappelle que les pays que Emmanuel Macron visite actuellement sont le Gabon où l’actuel président a succédé à son père, le Congo, avec un président en place depuis plusieurs années, la Rdc et l’Angola. Cela fait aussi que la France est souvent perçue comme un pays soutenant des régimes autoritaires.

Oumar KANDE

 

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